dimanche 24 novembre 2013

La RDC était autrefois un pays musulman!


Congo, les oubliés de la Oumma

19 novembre 2013, 22:41
Article écrit par le frère Pascal Youssef Baute, de l'asbl Nature Sciences Cultures
La République démocratique du Congo est le pays le plus vaste de l’Afrique. Il est aussi le pays aux plus riches ressources naturelles et un pays déchiré par la guerre civile. Si la première religion du Congo est de loin le Christianisme, avec une forte poussée des mouvements évangélistes et pentecôtistes, il n’en fût pas toujours ainsi. Le Congo était jusqu’au 19ème siècle un pays musulman. La colonisation belge et l’évangélisation ont tout changé au tournant du 20ème siècle.

Les origines

L’Islam est attesté au Congo depuis les alentours de l’an mille. Quand les portugais établirent des contacts commerciaux avec le Royaume du Congo en 1482, l’Islam y était bien implanté suite aux échanges commerciaux avec les Arabes 500 ans auparavant.

Cependant l’islamisation du Congo s’est accélérée au début du 18ème siècle avec la fondation du Sultanat de Zanzibar par les Omanais, puissance maritime et commerciale d’alors. Une culture métissée arabo-swahilie se forme alors. Les Zanzibarites pénètrent rapidement à l’intérieur des terres pour y faire le commerce, d’ivoire, d’or et autres métaux précieux et aussi d’esclaves. Ils pénètrent au Congo dès la fin du 18ème siècle et y fondent des comptoirs commerciaux, comme Ujiji, Baraka et Kasongo. Cette dernière ville comptait 60.000 habitants au 19ème siècle.

L’empire arabo swahili s’étend et se développe au Congo sous l’impulsion de Hamed Ben Mohamed Ben Yuma Ben Rajab El Murjebi, plus connu sous le nom de Tippou Tip, gouverneur zanzibarite du Congo. L’Islam pénètre le long des routes commerciales, les mosquées bourgeonnent dans les villes du Congo et les conversions se multiplient, d’autant plus facilement que les indigènes pratiquaient des religions de type ibrahimitiques basées sur la croyance en un Dieu unique. Il en résulte une culture métissée arabo-africaine. Les Belges parleront plus tard des noirs ‘arabisés’.

La découverte

Quand les occidentaux ‘découvrent’ le Congo, ils ne découvrent rien du tout, les Arabes y sont déjà installés depuis longtemps. Il y a déjà des villes et des pistes. Les Zanzibarites ont des relations avec tous les royaumes, les chefferies. L’Arabe et surtout le Swahili y sont des langues diplomatiques commerciales. Les premiers explorateurs ne peuvent se déplacer au Congo qu’avec l’autorisation et l’aide des Zanzibarites. La culture arabo-musulmane y est si présente que la plupart des explorateurs s’habillent en costume oriental. La plupart des européens en poste en Afrique centrale portent le fez, il suffit de voir les photos d’époque, quand ils ne se convertissent pas à l’Islam comme Emin Pacha.

Dans la deuxième moitié du 19ème siècle, les puissances européennes, la France, l’Angleterre, le Portugal, mais aussi les nouveaux venus, comme l’Allemagne dès les années 1870, l’Italie et la petite Belgique se jettent sur l’Afrique. Tout le monde voulait se tailler la part du lion. Les puissances occidentales avaient déjà vidé et détruit beaucoup d’états africains par la traite, mais ne pouvaient s’emparer du continent et de ses richesses, au-delà de l’établissement de postes commerciaux. Les Arabes étaient établis partout en Afrique. Les états africains disposaient d’armées nombreuses, bien organisées, très souvent équipées de mousquets et de canons, de fabrication locale, les mettant à armes égales avec les armées européennes. Jusqu’au 18ème siècle les états musulmans étaient pionniers dans le développement de l’armement, mais la tendance va s’inverser. La révolution industrielle de la fin du 18ème siècle, donne les moyens de leurs ambitions aux états européens avec le développement rapide de l’armement, fusils à répétitions, canons à longue portée, mitrailleuses.

En 1876, l’aventurier anglais Henry Morton Stanley explore le Congo, avec l’aide et l’appui de Tippou Tip. Il rapporte en Europe, toutes les merveilles et les richesses qu’il y a vu, mais aussi que l’Islam et les Arabes sont partout au Congo. Stanley se trouve un patron en la personne du Roi des Belges, Léopold II. Celui-ci, un homme aussi rapace que calculateur et dénué de scrupules, désirait une colonie depuis longtemps, se sentant fort à l’étroit dans son rôle de roi des belges.  Dès 1885 et la Conférence de Berlin, Léopold II fait reconnaître son état indépendant du Congo, un territoire équivalent à la RDC actuelle. L’EIC est géré comme une société privée, dont le Roi est l’administrateur délégué. Le Congo, n’est donc pas une colonie belge, mais la propriété privée du Roi. L’EIC devient également une zone de libre échange.

Au début les Zanzibarites et les Congolais musulmans acceptèrent bien l’implantation des postes de l’EIC au Congo, car ils espéraient commercer avec les nouveaux venus.

La destruction du Congo musulman

Dès 1886, se fonde une société antiesclavagiste en Belgique, ayant pour objet de dénoncer l’esclavagisme et la traite par les Arabes et les congolais musulmans. Une campagne de propagande se monte rapidement en Belgique contre les Arabes esclavagistes qui menacent la civilisation. En fait, pourquoi se partager le gâteau du Congo avec les Arabes quand on peut tout garder pour soi tout seul.

La tension anti musulmane augmente d’autant plus que le Soudan anglo-Egyptien se soulève sous la révolte de Mohamed Ahmed, dit le Mahdi. L’Etat indépendant du Congo se dote rapidement d’une armée de mercenaires, dont Stanley et de nombreux officiers en congé de l’armée belge et s’appuie sur le peuple guerrier des forêts équatoriales, Bangalas, non islamisés, pour fonder l’embryon de la force publique (pourquoi leur langue le Lingala est devenue la langue officielle du Congo). L’EIC monte plusieurs expéditions pour conquérir le Sud Soudan, sans succès. L’Angleterre se réappropriera le Sud Soudan par la suite. De plus les Allemands et les Anglais tentent aussi de prendre pied dans les Grands lacs. Les premiers s’emparent du Rwanda-Burundi, tandis que les Anglais intriguent au Congo et auraient même tenté d’appuyer le chef de guerre arabe Rumaliza dans sa rébellion contre l'EIC.

L’EIC rompt rapidement ses accords avec les Arabes et tente d’occuper et d’annexer les postes commerciaux des zanzibarites dans la fin des années 1880. La guerre ouverte éclate dans les années 90, de 1892 à 1894. Les mercenaires de l’EIC et leurs troupes de choc bangalas attaquent et prennent une à une les villes musulmanes du Congo. La résistance acharnée des Arabes et des Congolais musulmans est brisée par les fusils à répétition, les mitrailleuses, les canons à tir rapides de la Force publique. Les massacres et les exécutions se succèdent. Les mosquées sont saccagées et détruites. Tous ces massacres sont justifiés et cautionnés par l’opinion belge, au nom de la civilisation et de la lutte contre l’esclavage.

Ensuite dès la deuxième moitié des années 1890 , l’EIC généralise la mise aux travaux forcés de toute la population du Congo, avec l’exploitation des minerais, de l’ivoire, du caoutchouc, surtout et la construction des infrastructures. Les mercenaires bangalas et européens y multiplient les atrocités sur les civils. Les atrocités du Congo, suscitent l’indignation à l’échelle internationale, notamment aux Etats-Unis avec Marc Twain, pourtant très mal placés pour donner des leçons avec leur traitement des Indiens, des noirs et des Philippins (génocide moro). Ainsi après avoir sauvé les congolais de l’esclavage, Léopold II et les banquiers qui le financent transforment le Congo en une gigantesque prison à ciel ouvert où les gens meurent par millions. On trouve des squelettes aux abords des routes et des villages entiers sont vidés de leurs habitants.

Si ça ne suffisait pas, après avoir réduit la population en esclavage pour la délivrer de l’esclavage et sauver la civilisation, les pères blancs entrent en scène. Les enfants sont enlevés à leurs familles pour les ‘civiliser’ et les ‘évangéliser’ dans des orphelinats tenus par les pères. La faim, les mauvais traitements, les maladies et sans doute les abus de toutes sortes, font ici encore des victimes par millions.

Les crimes de Léopold II et de l’EIC se chiffrent en millions de morts. On estime de 9 à 10 millions de victimes au Congo au tournant du 20ème siècle. Personne ne sera jamais poursuivi pour ces crimes. Quand Léopold II décède, c’est l’état belge qui hérite malgré lui d’une colonie prospère, mais à la population exsangue. Le régime d’occupation belge est moins dur que celui de l’EIC, bien que se rapprochant du régime de l’Apartheid en Afrique du Sud. Les efforts d’évangélisation et d’extirpation de l’Islam, les conversions forcées, se multiplient, la religion catholique devient de loin la première religion du Congo. Toute prédication musulmane est interdite. Sous la colonisation belge, il y a bien eu des Africains de l’Ouest musulmans qui se sont installés, mais les prêtres ont inculqué la haine de l’Islam aux indigènes, afin de les détourner de leur ancienne religion. Ainsi on prétend que les mosquées sont des lieux maudits habités par des démons, qu’on devient fou si on écoute le Coran, présenté comme de la magie noire. Les musulmans du Congo, Rwanda et Burundi, qui ne se sont pas convertis au christianisme, deviennent des citoyens de deuxième catégorie, traités plus bas que bas. Les musulmans du Congo furent isolés ainsi sous une véritable chape de plomb. La province du Maniema est celle où l’Islam a le mieux résisté.

Le renouveau de l'Islam au Congo

Après la décolonisation et les dictatures et guerres qui se sont succédés, l’Islam connaît un nouveau souffle. Les guerres et le désespoir ont fissuré le monopole de l’Eglise catholique. Bien que les Africains des grands lacs se convertissent en masse au christianisme évangéliste et d’autres sectes protestantes, il y a aussi de plus en plus de conversions à l’Islam. L’islam congolais est en train de renaître. Beaucoup de Congolais se sont convertis au contact des casques bleus pakistanais.

Au Rwanda voisin, on constate le même phénomène, comme les musulmans n’ont pas participé au génocide qui a ensanglanté le pays dans les années 90. De plus, les musulmans qu’ils soient Hutus ou Tutsis se sont entraidés et ont sauvé beaucoup de leurs concitoyens chrétiens en leur accordant le refuge dans les mosquées. Les génocidaires endoctrinés par les curés, avaient peur des démons qui protégeaient les mosquées et avaient peur d’y pénétrer.

Plus que jamais, l’Islam est la seule solution pour une région ensanglantée par les conflits et les génocides, mais les musulmans des grands lacs restent isolés et démunis. Il est du devoir de l’Oumma d’aider nos frères congolais à rebâtir leur communauté après un siècle de persécutions et de guerre.

En Belgique, pas un mot sur les crimes des sbires de Léopold II au Congo et surtout pas contre les musulmans congolais. Il suffit de lire les récits de la guerre contre les arabisés sur Wikipedia, qui sont présentés d’un côté très favorable aux belges. Les monuments aux civilisateurs trônent toujours dans les villes belges. Pire, au Musée de l’Armée à Bruxelles, plusieurs vitrines sont consacrées à l’œuvre civilisatrice des belges au Congo, dans la guerre contre les Mahdistes du Soudans, et la guerre contre les Arabes esclavagistes qui menacent la civilisation, avec armes, costumes, bannières, Corans pris aux Arabes musulmans.

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